La garde à vue
La
garde à vue est une mesure prise dans le cadre d'une enquête judiciaire. Elle
vise à maintenir à disposition, par la contrainte, une personne soupçonnée
d'avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine
d'emprisonnement. Le témoin est celui à l'encontre duquel " il n'existe
aucun indice faisant présumé qu'il a commis ou tenté de commettre une
infraction" (art 62 du CPP). Il ne peut donc faire l'objet de cette
mesure. Il en va de même pour les députés, les agents diplomatiques et le
président de la République qui bénéficient d'une immunité.
Les
mineurs bénéficient d'un régime dérogatoire, dont l'importance varie selon
l'âge du suspect. Les enfants de moins de 10 ans ne peuvent pas être retenus.
Entre 10 et 13 ans, un mineur peut être retenu 12h. Ce délai peut être doublé
après sa présentation devant un magistrat. De 13 ans à 16 ans le mineur peut
être mis en garde à vue pour une durée de 24 heures et peut être allongée de 24
heures si l'infraction commise est punie d'une peine de 5 ans d'emprisonnement
ou plus. Avant le début de la mesure, le mineur doit être présenté au juge
chargé de l'instruction. Enfin, les mineurs de 16 ans à 18 ans se voit
appliquer le même régime que pour les adultes à la différence près que les
parents doivent être prévenu de la mesure prise à leur encontre.
Compte
tenu de sa gravité, cette mesure est strictement encadrée par les articles 63
et suivants du code de procédure pénal.
Les
personnes habilitées pour placer un suspect en garde à vue sont les officiers
de police judiciaire ou de gendarmerie ainsi que les agents de la douane. Dès
le début de la mesure le procureur doit être informé sous peine d'irrégularité
de la procédure, à moins que des circonstances insurmontables empêchent
cette communication. Lorsque le prévenu est accusé d'un crime, la garde à vue
doit être obligatoirement enregistrée, sauf si l'infraction relève de la
criminalité organisée. A l'issu de la mesure un procès-verbal est dressé, sur
lequel doit figurer un certains nombres d'éléments, tel que le motif de la
garde à vue, la durée des interrogatoires, le moment où la personne s'est vu
notifier ses droits. La personne doit signer ce document, ainsi que le registre
sur lequel figure les mêmes éléments.
La
garde à vue poursuit deux objectifs. Tout d'abord, elle doit être exercée sous
la contrainte. Le conseil constitutionnel a précisé qu'une audition libre n'est
pas une garde à vue.
L'article
2 de la loi du 14 avril 2011, devenu l'article 62-2 du CPP, énumère six
objectifs de la mesure. Un seul des motifs suffit à justifier la mesure. Elle
doit faciliter la poursuite des investigations, garantir la présentation de la
personne devant le procureur de la République, empêcher que la personne ne
fasse pression sur les témoins ou les victimes, empêcher la communication entre
l'auteur des faits et ses complices, garantir la mise en oeuvre des mesures
destinées à faire cesser le crime ou le délit.
En
principe, la durée de garde à vue est de 24 heures. Elle peut être prolongée de
24 heures lorsque l'infraction dont est accusé le suspect, est punie d'au
moins 1 an d'emprisonnement. La décision de prolongation est prise par le
procureur de la République ou le juge d'instruction. Le code de procédure
pénal prévoit certains cas, pour lesquels la durée de la garde à vue peut
s'étendre jusqu'à 96 heures. Il s'agit notamment des crimes et délits commis en
bande organisée.
Lorsque
l'infraction est constatée lors d'une enquête de flagrance, le début de la
garde à vue commence dès le moment ou la personne est remise à l'officier de
police ou de gendarmerie. Dans les autres cas, elle démarre au moment de
l'interpellation de l'individu par les forces de l'ordre ou durant sa
présentation dans les locaux de la police. Dans tous les cas, cette mesure doit
faire l'objet des son commencement d'un porcès-verbal de notification et d'une
notification des droits au suspect.
A
l'issue de la garde à vue, trois situations juridiques sont envisageables. Le
prévenu peut être relâché sur décision du procureur, soit pour les besoins de
la poursuite de l'enquête, soit parce qu'aucune charge ne pèse sur la personne
placée en garde à vue. Le procureur peut engager des poursuites, en ordonnant
un classement sans suite sous condition, en délivrant une citation à
comparaître, en présentant la personne au juge d'instruction, en déférant la
personne au parquet. Enfin le procureur peut proposer au prévenu et à la victime
une médiation pénale.
La
personne gardée à vue bénéficie de certains droits. Tout d'abord, elle doit
être informée de la nature de l'infraction qu'on lui reproche, des conséquences
procédurales après sa remise en liberté. Elle peut en outre après trois heures
de garde à vue prévenir la personne de son choix. L'officier de police peut
néanmoins lui refuser ce droit, à la condition que le procureur donne son
accord. L’article 63-3 du CPP autorise la visite d'un médecin, sur demande du
gardé à vue, de sa famille, ou bien sur décision du procureur de la République,
juge d'instruction ou OPJ. L'examen médical est obligatoire pour un mineur de
16 ans.
Depuis
la condamnation de la France par la CEDH dans l'arrêt Busco le 14 avril 2011,
le prévenu doit se voir notifier son droit de garder le silence.
Le
gardé à vue a droit à un avocat. Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un,
on peut lui en désigner un d'office. Pour les gardes à vue de droit commun, la
présence d'un avocat est possible dès la première heure. La prolongation de la
garde à vue peut donner lieu à une nouvelle entrevue.
L'entretien, qui est confidentiel, ne peut excéder 30 minutes. L'avocat
n'a accès qu'à certains éléments du dossier, tel que le PV d'audition, nature
et date présumées de l'infraction. D'autres pièces du dossier peuvent lui être communiquées
selon le bon vouloir des enquêteurs. La CEDH dans l'arrêt Salduz, rendu le 27
novembre 2008, a précisé que la présence de l'avocat lors de l'interrogatoire
était indispensable. En droit français, l'avocat peut être présent mais il ne
peut intervenir qu'à la fin de l'audition. Il est intéressant à noter, que en
principe la garde à vue ne peut faire l'objet d'aucun recours. Un arrêt rendu
par la Cour d'appel de Rennes a néanmoins condamné l'Etat en 2008 à
verser une indemnisation à des personnes placées en garde à vue de manière
abusive.
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